Innovations et enjeux dans le parcours de soin du sujet âgé atteint de cancer
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Innovations et enjeux dans le parcours de soin du sujet âgé atteint de cancer
 

Notre pays doit faire face au vieillissement de la population avec une augmentation de l’incidence des maladies chroniques et en particulier du cancer. L’incidence du cancer augmente avec l’âge1,2 avec plus de 60% des nouveaux cas de cancers diagnostiqués chez les plus de 65 ans.

Quel que soit les scénarios envisagés par les démographes, l’évolution du nombre de cancers dans la population gériatrique sera en constante augmentation dans les 10 prochaines années. Chez la femme pour exemple, le cancer du sein est le plus fréquent avec, chez les plus de 65 ans, plus de 28000 nouveaux cas par an.

La survie nette à 10 ans est de 65% chez les 75 ans et plus alors qu’elle est de 83% chez les 45-54 ans.2 Ces projections démographiques doivent nous interroger également sur notre système de soin qui est insuffisamment centré sur la prévention et la prédiction et sur les pistes d’amélioration et les enjeux. L’enjeu primordial en oncologie gériatrique s’inscrit donc dans l’optimisation du parcours de soin des patients âgés atteints de cancer avec pour but d’anticiper les évolutions défavorables.


 

Comment définir un parcours de soin harmonieux ?

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La haute autorité de santé définit un parcours de soin harmonieux s’il comprend le bon enchainement, au bon moment des différentes compétences professionnelles liées directement ou indirectement aux soins. Ceci comprend donc les consultations, les actes techniques et biologiques, les traitements spécifiques mais aussi la prise en charge des épisodes aigus et la prise en charge médico-sociale et sociale. Tout ceci implique donc, pour la personne âgée, des actions de coordination mais surtout d’anticipation avec un échange collaboratif optimisé entre les différents acteurs impliqués. Ces actions doivent s’inscrire obligatoirement dans les bonnes pratiques médicales avec un accompagnement à long terme incluant aussi « l’après cancer » et les filières de soins palliatifs.3

En parallèle aux compétences techniques, une prise en charge humaine dans le respect constant du principe de bienfaisance doit constamment accompagner ce parcours.3 Le premier enjeu est donc une meilleure coordination des intervenants autour de nos patients âgés dans le respect du principe de bienfaisance.

 

La France déjà à l’avant-garde de l’accompagnement en Oncogériatrie !
 

Depuis ces dernières décennies, la collaboration cancérologues-gériatres est exemplaire en France et a contribué à l’amélioration de la prise en charge des patients âgés. En parallèle le développement de nouvelles thérapies innovantes a vu le jour avec un profil de toxicité adapté à nos ainés.

Ces organisations sont secondaires au déploiement des Unités de Coordination en Oncogériatrie (UCOG) sous l’impulsion de l’INCA en 2006 puis la création d’une seconde vague en 2011. Il existe aujourd'hui 24 unités de coordination en oncogériatrie déployées sur le territoire français. Quatre antennes d'oncogériatrie (AOG) ont également été créées, dans un objectif de réduction des inégalités de santé. Les 4 principales missions des UCOG initialement ont été de : mieux adapter les traitements des patients âgés atteints de cancer par des décisions conjointes oncologues-gériatres ; de promouvoir la prise en charge de ces patients dans la région afin de la rendre accessible à tous ; de contribuer au développement de la recherche en oncogériatrie, notamment en impulsant des collaborations interrégionales et de soutenir la formation et l'information en oncogériatrie.5 En pratique courante, la SIOG (Société Internationale d’Oncogériatrie) et l’ASCO (Société Américaine d’Oncologie) recommandent de réaliser une évaluation oncogériatrique standardisée (EGS) avant une prise en charge spécifique du fait de l’hétérogénéité de la population.6,7 

L’EGS a pour but de répondre aux missions de soin et d’accompagnement, elle permet de grader les niveaux de fragilités des patients en éclairant la décision médicale mais aussi de proposer des interventions gériatriques ciblées sur les déficits.8 L’évaluation gériatrique est chronophage, mais un outil de dépistage de la fragilité a été développé par Soubeyran et al pour dépister les patients nécessitant une évaluation complète au commencement de leurs parcours de soins.8 L’EGS permet ensuite au fil du parcours de proposer des interventions gériatriques et de proposer un suivi personnalisé.

Cependant, Kenis et al ont montré une adhérence à ces interventions qui n’était pas toujours optimum dans les différents domaines déficitaires avec 46,2% d’adhésion sur l’ensemble des interventions proposées.9 Les recommandations sont largement données par les praticiens mais les implémentations sont parfois difficiles à mettre en place.8 Une étude de cohorte française, a montré qu’en moyenne 2,8 interventions étaient proposées, le phénotype des patients ayant plus de 3 interventions et nécessitant donc une coordination vigilante comprenait des déficits sur des domaines bien identifiés de L’EGS (nutrition, thymie, cognition) et sur le dépistage G8 et le « performance status » (PS).1 Ces marqueurs de l’EGS peuvent être ainsi utiles pour proposer un suivi modulé aux différents profils de patients. La graduation du suivi et des interventions est donc essentielle. 

Le second Challenge pour la future décade est donc d’installer une coordination harmonieuse et un suivi des interventions oncologiques et gériatriques à l’échelle des patients dans une dynamique de maillage régional efficace !


 

Des outils et des équipes au service de l’accompagnement des patients âgés

Les enjeux sont donc de repenser et proposer des nouveaux modèles de coordination des professionnels de santé autour du patient. Ainsi il faut continuer à diffuser largement le dépistage de la fragilité avec le G8 permettant des évaluations adaptées et des actions ciblées. La graduation des niveaux d’interventions permettra de donner des objectifs clairs de prise en charge aux nouveaux acteurs de la coordination pour permettre un parcours de soins harmonieux.

Le développement de ces nouveaux métiers du parcours de soins est la pierre angulaire de ces futures organisations. Les infirmières de pratiques avancées, les infirmières de coordination ou gestionnaires de cas ont acquis des compétences répondant à ces missions.1

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La gestion personnalisée des patientscase management ») est au cœur de ce dispositif et la graduation des prises en charge permettra l’efficience de ces systèmes pour ajuster les actions aux situations des patients à l’échelle d’un maillage régional. Créer une dynamique avec une notion d’équipe élargie autour du patient incluant plus largement les professionnels de ville est un challenge important. 

Renforcer les liens avec le médecin traitant, les pharmaciens et les paramédicaux en ville est prioritaire dans un parcours de soins harmonieux.10

Des projets pilotes dans les UCOG sont en cours de mise en place.1 L’un au niveau régional, avec une plateforme numérique oncogériatrique en PACA (UCOG PACA EST), initiative inclus dans un vaste projet autour du « Bien vieillir » piloté par le Pr Guérin (CHU de Nice), qui a pour but d’améliorer la communication de l’équipe élargie autour du patient.11 L’autre au niveau européen, le projet GerOnTE porté par le Pr Soubeyran (Institut Bergognié, Bordeaux) dont l’un des axes évaluera le « case management » au cœur d’un dispositif technologique avec une approche holistique des patients.12 L’enjeu sera également l’évaluation de l’efficacité de ces systèmes qui pourraient être généralisés et financés secondairement plus largement. Les outils numériques sont évidemment les écrins de ces organisations avec des outils ergonomiques de gestion de cas permettant une communication fluide entre les professionnels à travers des plateformes numériques. Elles permettent également de recueillir des informations des patients et des aidants à forte valeur informatives et, on le sait maintenant, parfois pronostiques. L’intelligence artificielle (IA) est un domaine également en plein expansion pour le suivi, le regroupement de données issues des plateformes et la prédiction des évolutions. 
Mais, l’enjeu du numérique passe aussi par l’acculturation et l’éducation des patients et des aidants parfois également âgés à ces nouvelles technologies et reste un autre challenge à relever. 

Pour conclure, l’optimisation des parcours de soins des patients en oncologie gériatrique se fera par des outils technologiques mais surtout des équipes dédiées aux métiers de la coordination. Les enjeux primordiaux sont le renforcement du lien ville-hôpital, le suivi coordonné et personnalisé des actions gériatriques et oncologiques et l’acculturation à des outils numériques adaptés pour nos ainés. La prédiction des évolutions et l’aide à la décision par l’IA devient une perspective attendue de ces dispositifs innovants.


 

*Avis d’expert

 

 

L’experte
 

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expert

Dr Rabia BOULAHSSASS
Oncogériatre
UCOG PACA EST, Pôle Réhabilitation Autonomie Vieillissement
Hôpital de Cimiez, CHU, Nice

 

Références

  1. Boulahssass R, et al. The Desire to Better Understand Older Adults with Solid Tumors to Improve Management: Assessment and Guided Interventions-The French PACA EST Cohort Experience. Cancers (Basel). 2019;11(2):192. Published 2019 Feb 7. doi:10.3390/cancers11020192. 

  2. HAS. Épidémiologie des cancers chez les patients de 65 ans et plus. Disponible sur : https://www.e-cancer.fr/Professionnels-de-sante/L-organisation-de-l-offr.... Dernière consultation le 09/09/2021. 

  3. HAS. Parcours de soins. Questions / Réponses. Mai 2012. 

  4. INCa. Panorama des cancers en France. Édition 2021. 

  5. HAS. Les unités de coordination et antennes d'oncogériatrie. Disponible sur : https://www.e-cancer.fr/Professionnels-de-sante/L-organisation-de-l-offr.... Dernière consultation le 09/09/2021. 

  6. Wildiers H, et al. International Society of Geriatric Oncology consensus on geriatric assessment in older patients with cancer. J Clin Oncol. 2014;32:2595-603. 

  7. Mohile SG, et al. Practical Assessment and Management of Vulnerabilitiesin Older Patients Receiving Chemotherapy: ASCO Guideline for Geriatric Oncology Summary. J Oncol Pract. 2018;14:442-46. 

  8. Soubeyran P, et al. Screening for vulnerability in older cancer patients: The ONCODAGE Prospective Multicenter Cohort Study. PLoS ONE. 2014;9:e115060. 

  9. Kenis, C. et al. Adherence to geriatric assessment-based recommendations in older patients with cancer: A multicenter prospective cohort study in Belgium. Ann Oncol. 2018;29:1987-94. 

  10. HAS. Note méthodologique et de synthèse documentaire. « Coordination des parcours. Comment organiser l’appui aux professionnels de soins primaires ? ». Septembre 2014. 

  11. SoFOG. Monaco Age Oncologie. Cours Francophone d’Oncogériatrie. 8e édition. 18-19 mars 2021. Programme préliminaire. 

  12. Projet Horizon. Soubeyran P, and al. Streamlined Geriatric and Oncological evaluation based on IC Technology for holistic patient-oriented healthcare management for older multimorbid patients. Disponible sur : https://siric-brio.com/projets-horizon-2020-en-oncogeriatrie-et-environn....

151639 – Décembre 2021 – Copyright Novartis Pharma SAS

 

 

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